Le contrôle de la régularité impose au pouvoir adjudicateur de vérifier la présence ou l’absence d’irrégularité impliquant l’écartement de l’offre. Si une offre contient une irrégularité dite « substantielle », l’offre sera écartée : on perçoit donc l’importance de la question, et surtout des conditions encadrant ce contrôle.
L’article 76 de l’Arrêté royal du 18 avril 2017 établissant les règles générales d’exécution des marchés publics prévoit que ce contrôle est effectué sur base d’indices :
« Constitue une irrégularité substantielle celle qui est de nature à donner un avantage discriminatoire au soumissionnaire, à entraîner une distorsion de concurrence, à empêcher l'évaluation de l'offre du soumissionnaire ou la comparaison de celle-ci aux autres offres, ou à rendre inexistant, incomplet ou incertain l'engagement du soumissionnaire à exécuter le marché dans les conditions prévues. »
Si le pouvoir adjudicateur constate que l’une de ces conditions est remplie, l’irrégularité sera déclarée substantielle, impliquant l’écartement de l’offre.
Au-delà de ces indices, la disposition légale précitée prévoit des cas de présomptions d’irrégularité substantielle :
« Sont réputées substantielles notamment les irrégularités suivantes : 1° le non-respect du droit environnemental, social ou du travail, pour autant que ce non-respect soit sanctionné pénalement ; 2° le non-respect des exigences visées aux articles 38, 42, 43, § 1er, 44, 48, § 2, alinéa 1er, 54, § 2, 55, 83 et 92 du présent arrêté et par l'article 14 de la loi, pour autant qu'ils contiennent des obligations à l'égard des soumissionnaires ; 3° le non-respect des exigences minimales et des exigences qui sont indiquées comme substantielles dans les documents du marché. »
Le dernier cas de figure vise-t-il une indication explicite, dans les documents du marché, que telle ou telle prescription est une prescription dont le non-respect implique l’irrégularité substantielle ?
Dans le cadre d’un marché public portant sur la mise en œuvre d’une conformité à une norme ISO, le pouvoir adjudicateur écarte, pour ce motif précis, une des offres. Le soumissionnaire évincé conteste la décision de déclarer son offre irrégulière dès lors que la prescription qu’il n’a pas respectée n’était pas explicitement renseignée, en cas de manquement, comme étant source d’irrégularité substantielle.
Le Conseil d’État, dans son arrêt n°257.163 du 8 août 2023, analyse de manière détaillée les documents contractuels. Il indique, à la suite de son analyse :
« Le fait que les obligations précitées sont “au minimum” comprises dans le marché et la mise en exergue, en gras, de l’exigence de la mise en place d’une “culture de la gestion des risques à tous les niveaux”, indiquent prima facie l’importance particulière qui leur est accordée en tant qu’élément essentiel ou exigence minimale du marché. Par ailleurs, le CSC insiste par deux fois sur l’importance de la remise d’une note détaillée démontrant que l’outil répond bien aux fonctionnalités attendues du présent cahier des charges. »
En conclusion, il faut retenir que les « exigences minimales et des exigences qui sont indiquées comme substantielles dans les documents du marché », au sens de l’article 76, § 1er, alinéa 4, 3°, de l’arrêté royal du 18 avril 2017 susvisé, ne doivent pas être nommées comme telles dans les documents établis par le pouvoir adjudicateur. Il suffit que le vocabulaire employé soit suffisamment clair quant à l’intention du pouvoir adjudicateur.